30 avril 2021
Une cagnotte et des contrats AMAP solidaires pour Anaïs, nouvelle éleveuse dans la vallée de la Bassée
Avant de prendre soin des moutons, Anaïs a fait un BTSA gestion et de protection de la nature, en alternance à l’île d’Oléron, et a lancé une activité d’éco-pâturage à Nantes. C’est ensuite Catalogne qu’elle découvre le métier de bergère puis elle obtient son diplôme de bergère à l’école du Merle. Après un passage dans le Lubéron et en Nouvelle-Zélande elle atterrit finalement en Île-de-France et rejoint la coopérative d’activités Les Champs des Possibles.
Comment ça va dans les prairies ?
Anaïs a réalisé son premier agnelage seule et en plein air ! Les trois mois passés à la Ferme de Toussacq, où les brebis ont pu pâturer sur des prairies et des couverts ont été riches en émotions. Il y a eu des grosses périodes de pluie, de la neige … Anaïs a surmonté la météo et se retrouve aujourd’hui avec environ 120 agneaux.
Anaïs et ses brebis ont repris la route fin mars vers les pâtures habituelles. Il n'y a pas beaucoup d'herbe pour le moment ; elle compte sur le beau temps pour l’aider à pousser.
Et le moral ça va ?
Anaïs était un peu à plat à la fin de l'agnelage ! Ça a été une période très stressante mais elle ne doute pas que cela s’apaisera avec les années.
Le retour du soleil et la reprise du circuit de pâturage ont relancé sa dynamique.
Elle est enthousiaste de voir son projet avancer, et a plein de nouveaux projets en cours !
Comment s'annonce la saison à venir ?
Cette nouvelle saison s'annonce très riche ! Elle a plusieurs nouvelles propositions de pâturages. Elle est actuellement en train de mettre en place des contrats viande d'agneau avec différentes AMAP.
Il va falloir trouver deux nouveaux béliers pour la reproduction...
Et elle a aussi pris la grande décision de racheter le troupeau dont elle s'occupe depuis maintenant huit mois en lançant une cagnotte solidaire en ligne (toutes les infos sur ce projet et la cagnotte, à partager largement, sont ici.
Elle avance petit à petit et consolide son projet.
Comment penser un contrat viande solidaire ?
Depuis 2018, le Réseau AMAP IDF a lancé un chantier pour construire et consolider les contrats que l’on appelle de manière peu satisfaisante « Hors maraîchages ». Logistique de livraison, présence aux distributions, partage de récolte, solidarité : les fondamentaux du contrat AMAP sont moins intuitivement applicables pour l’arboriculture, l’élevage, les plantes aromatiques etc. que pour le maraîchage. Plus de détails ici. C’est pourquoi chaque année, en fonction des installations paysannes dans la Région, nous accompagnons les paysan·ne·s en AMAP à réfléchir, avec leurs groupes AMAP, à des contrats solides et solidaires.
Cette année, avec les Champs des Possibles, nous avons entamé un chantier avec Anaïs sur la construction de partenariats solidaires pour sa viande d’agneau. Bien souvent, et par facilité du côté amapien et paysan, les contrats viande ressemblent plus à des commandes groupées qu’à des contrats AMAP. C’est ce qui s’est passé l’année passée : Anaïs a vendu ses agneaux à 6 AMAP sans engagement contractuel : elle envoyait ses agneaux à l’abattoir et prévenait les AMAP une semaine auparavant. Cette organisation était chronophage et source de stress, sans compter l’absence de mécanisme de solidarité intégré au partenariat. C’est pourquoi nous avons réfléchi avec elle puis avec des amapien·ne·s à la mise en place de contrats plus engageants et solidaires. Idéalement, pour qu’Anaïs ait un revenu stable, il faut prendre en compte la saisonnalité et les aléas, c’est-à-dire ne pas s’engager sur un prix au kilo mais sur une part intégrant les aléas éventuels.
Un calendrier et des aléas très différents du maraîchage
A chaque production ses maladies, ici les brebis ne craignent pas les altises ou les mouches drosophiles mais plutôt les virus qui provoquent la naissance d’agneaux prématurés et déformés. Cette année, Anaïs a eu 25 avortements à cause de ce virus.
Les conditions météorologiques sont également contraignantes : le froid, l’humidité, la neige peuvent causer des pertes et être difficiles à gérer physiquement et mentalement pour la bergère.
Concernant le calendrier, on n’a pas des agneaux comme on a des légumes toute l’année. Les agneaux naissent dès janvier. Au mois de mars, le cycle de pâturage reprend et les agneaux sont engraissés, et à partir de juin commencent les abattages. Ils s’échelonnent jusqu’à novembre mais nul ne peut prédire à quelle vitesse les agneaux vont grandir et prendre du poids : les abattages se font au fil de l’eau et de l’évolution des animaux. A la mi-août, les béliers sont mis en lutte avec les brebis. La reproduction dure un mois et demi, puis vers décembre le troupeau s’arrête pour que les brebis se reposent. A la mi-janvier les premières naissances à nouveau et le cycle reprend son cours…
Les premières pistes de réflexion
Comment sortir du prix au kilo ? Pour soutenir pleinement Anaïs, il faudrait imaginer un prix forfait pour soutenir sa production quel que soit le poids des agneaux, tout comme un maraîcher distribue un panier de légumes plus ou moins plein selon l’état de la récolte. Toutefois l’écart de poids entre un petit et un grand agneau peut être conséquent s’il est rapporté au prix au kilo, jusqu’à 60€. Une piste envisagée est de proposer 3 fourchettes de prix correspondant à 3 tailles d’agneaux.
Un détail trivial mais non sans importance du côté amapien : la taille du congélateur. Conserver 8 kg d’agneau dans le compartiment supérieur d’un appartement parisien, ce n’est pas une mince affaire. Une solution pour y remédier serait le partage de colis entre des binômes amapien·ne·s.
De plus, certain·e·s amapien·ne·s sont végétarien·ne·s, or pour peu qu’il y ait déjà un contrat porc ou veau dans l’AMAP, les producteur·rice·s de viande se font alors concurrence. Alors pourquoi ne pas imaginer faire reposer la solidarité non pas individuellement mais collectivement au sein de l’AMAP ? Sur ses 120 agneaux, en comptant les pertes et le renouvellement, Anaïs aura environ 80 agneaux à vendre, ce qui revient à 160 colis de ½ agneaux à vendre entre juin et novembre. On pourrait alors imaginer répartir ces 160 colis sur les 6 AMAP avec qui elle est en partenariat. Cela signifierait que pour avoir un partenariat avec Anaïs, chaque AMAP s’engagerait à récolter au moins 25 contrats environ.
Les pistes évoquées ici sont encore en cours d’études, et Anaïs est en train de faire ses premières propositions de contrat, mais si cette thématique vous intéresse n’hésitez pas à nous contacter. D’ici là, n’hésitez pas à relayer sa cagnotte !
Par Ninon, salariée du Réseau AMAP IdF