26 fév 2021

Portrait : Manon, de la théorie à la pratique

De l’histoire à la géographie sociale

Manon a grandi à Grenoble, et c’est là qu’elle a commencé l’université. Plus précisément au sein de l’UFR de l’Institut d’urbanisme et de géographie alpine, qui n’a d’alpin que le nom, puisqu’on n’y étudie pas que la géographie des montagnes, mais aussi celle des villes. Au lycée, ce qu’elle aimait c’était plutôt l’histoire, mais arrivée à l’université, la géographie lui a paru plus en prise avec le présent. Après un an d’histoire, elle a donc bifurqué, au départ pour se lancer dans l’urbanisme, qui l’a rapidement ennuyée. Elle a donc finalement opté pour le parcours « Espace Sociétés », qui permettait d’aborder aussi la géographie par l’angle de la sociologie. C’est ce volet qu’elle a approfondi en partant passer un an à Dublin en troisième année, dans le cadre du programme Erasmus. Là elle se familiarise avec les questions de genre et de violence, et revient, motivée pour partir faire un Master à l’étranger…

Sortir de la théorie et aller sur le terrain

Et puis finalement décide de prendre une année de césure pour sortir un peu de la théorie et du monde étudiant et aller voir sur le terrain comment les choses se passent. Elle est embauchée pour un service civique de 9 mois au sein d’une association qui gère une épicerie solidaire, et dans laquelle est engagé bénévolement son père. Là, elle se charge de gérer l’organisation des paniers solidaires, sous la houlette d’un jeune encadrant super, qui lui fait découvrir tout le champ de l’économie sociale et solidaire et de l’autogestion. Les paniers sont destinés aux personnes précaires, engagées par un contrat avec l’association, qui sert d’intermédiaire et finance en partie les paniers fournis par des paysans locaux. L’objectif est de rendre accessible une alimentation saine, bio et équilibrée.

Une vie confinée ni solitaire ni bétonnée

Après cette expérience de terrain, retour sur les bancs de l’école avec un Master à Paris I intitulé « Dynamiques des Pays du Sud », et en ligne de mire un séjour en Amérique latine. Mais au bout d’un semestre, c’est la déception. Retour à Grenoble, et petit boulot alimentaire dans un fast-food québécois, qui vend des poutines (des frites avec une sauce et du fromage, rien à voir avec Vladimir). Le confinement arrive par là-dessus et Manon va cueillir des abricots dans la Drôme. Elle vit dans une tente plantée dans un champ de kiwis. C’est la belle vie. A la rentrée, elle décide de se remettre aux études, cette fois au sein du Master « Espace Société Territoire » de l’université de Créteil-Marne la Vallée. Elle se trouve un logement à la Cité Universitaire, au pavillon du Cambodge, se lie avec un groupe de réparation de vélos et reprend les rênes d’une association qui entretient un jardin partagé dans le parc de la Cité. La vie confinée à Paris n’est ni solitaire ni bétonnée : elle a son jardin et sa communauté.

Immersion au cœur des AMAP, pour allier genre et accessibilité

Pour valider sa première année de Master, elle a le choix entre pondre un mémoire et effectuer un stage. Ayant opté pour la seconde option, elle tombe sur l’offre du Réseau AMAP IdF, qui la séduit parce qu’elle lui permet d’allier les questions de genre et d’accessibilité alimentaire. Si le système des AMAP est nouveau pour elle, elle a déjà remarqué, au cours de son expérience des paniers solidaires, à quel point le domaine de l’alimentation est peuplé de femmes et elle a déjà souhaité interroger ce biais. Pour ce qui est de l’accessibilité, elle lit beaucoup sur la question et a déjà des idées : ce qui exclut de fait une partie de la population des groupes AMAP, ce n’est pas seulement une question d’éducation (de fait, les questions alimentaires font l’objet de nombreuses enquêtes très médiatisées et la conscience des ravages de la malbouffe est plutôt bien répandue dans toutes les couches de la société), c’est aussi une question de violence symbolique. Celle qui fait qu’on peut ne pas se sentir légitime dans le cadre d’un groupe AMAP, ou qu’on peut tout simplement ne jamais en entendre parler, parce qu’on ne fréquente pas les cercles d’initié.es. Et puis, sur le plan matériel, il y a la contrainte de l’engagement, qui oblige à être présent pour récupérer le panier et à être capable de le préfinancer.

Un programme bien chargé pour les 5 prochains mois

Pour le moment, elle se réjouit d’être très bien accueillie au sein des groupes où elle vient observer. Elle sent bien que les amapien.nes sont sensibles à ce sujet, par lassitude de l’éternelle rengaine sur les AMAP qualifiées de « truc de bobos » et par l’engouement que génère l’idée de rendre le modèle accessible au plus grand nombre. Le stage a démarré au début de mois de février, la phase de recherche bibliographique s’achève, le questionnaire est presque finalisé et sera présenté à l’AG. La phase d’observation et d’entretiens démarre, et se déroulera tout le mois de mars. L’analyse des données aura lieu vers le mois de mai, et la restitution est prévue pour juillet. Plusieurs formats sont envisagés : un petit rapport écrit, un podcast avec des extraits d’entretiens. Le travail de Manon est encadré par un comité de pilotage composé de salariées et d’administrateurices du réseau, qui se réunit régulièrement et suit de près ses avancements, et que l’on peut chaleureusement remercier ici. Autant dire que tout le monde est très impatient de découvrir les conclusions de ce travail passionnant

Par Maud, administratrice du Réseau

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