L'agriculture, c'était mieux avant ? Manger, un acte politique ? Si vous étiez paysan·nes, vous seriez … ? C'est équipé d'une de ces questions que des équipes d'amapien·nes ont investi l'espace public à plusieurs occasions. L'objectif premier : échanger avec des personnes d'horizon divers sur des questions relatives à l'alimentation et à l'agriculture et ainsi réinsuffler du débat dans l'espace public.

Ces initiatives sont toutes inspirées d'un dispositif appelé Porteur de Paroles, développé, il y a une vingtaine d'années, par des mouvements d'éducation populaire. Un des initiateurs de cette démarche le décrit comme étant un « attrape gens » facilant les échanges en dehors de son cercle habituel. Cette animation est basée sur la rencontre et les échanges entre des personnes sur des sujets de société. A partir d'une question qui nous touche et nous intrigue, nous partons discuter avec les passant·es afin qu'ils et elles nous partagent leur point de vue et réfléchissent avec nous à cette question.

De cet échange est conservé une parole singulière, sortant des réponses stéréotypées, parole qui est inscrite sur des panneaux colorés et affichés dans la rue afin qu'elles puissent être lues par toutes et tous et susciter de nouvelles réactions.

Voici quelques expériences vécues récemment :

Le choix de la question est essentiel pour le succès du dispositif

Ne pas être moralisateur, ni trop militant, interpeller pour permettre la participation sans bloquer le débat.

Pour le Salon de l'agriculture, le manque de place ne permet pas d'afficher les paroles, le groupe décide alors de se centrer sur une question à poser et cette question est difficile à trouver. En effet, il est important que ce soit une question pour laquelle nous (les animateur·rices) avons un intérêt certain, pour laquelle nous n'avons pas une réponse toute faite et qui va permettre une multiplicité de réponses et de singularité dans les paroles. Le remue-méninge sur le choix de la question est trop court pour ne choisir qu'une question. Le jour J, chaque groupe part avec une question différente : « L'Agriculture, c'était mieux avant ? » qui a permis de nombreux échanges et « On dit souvent que l'alimentation coûte trop cher, qu'en pensez-vous ? », qui a été plus complexe.

Pour Antonin, de l'AMAP des Saules, qui a expérimenté le porteur de parole dans le groupe SSA de Versailles-Saint-Quentin-en-Yvelines-Saclay, la meilleure manière de choisir une question est de la tester, dans son entourage d'abord, puis dans l'espace public. On comprend alors très vite qu'une question est mal formulée ou bien n'est pas adaptée à tous les contextes.

Si vous étiez paysan·nes, vous seriez … ?

C'est la question choisie par une équipe de bénévoles d'AMAP et de Terre de Liens pour aller à la rencontre des personnes dans le parc des Lilas à Vitry à l'occasion de la fête des moissons, fin août. L'envie était de recueillir la perception du métier de paysan·nes par des citadin·es, de leur situation actuelle, et de voir si certain·nes se projettent dans des métiers agricoles. Les paroles collectées sont diverses : empreintes d'un certain pessimisme pour la situation des agriculteur·rices pour certaines ou, au contraire, d'un élan joyeux vers une forme alternative d'agriculture. Les animatrices sont à l'écoute, impliquées dans l'échange et les personnes expriment avec entrain leur point de vue : des jeunes porteurs de projet, des femmes qui racontent leur lien avec la terre en plongeant dans leur jeunesse, des rêves de projets collectifs et d'agriculture durable et écologique mais aussi quelques adolescent·es sans mot devant cette question peut-être éloignée de leur quotidien. Partageons une parole : « C'est un métier difficile et passionnant. Est-ce qu'un agriculteur qui produit de la qualité ne devrait pas gagner autant qu'un ingénieur ? », Philippe 55 ans.

par Emilie, salariée du réseau AMAP IdF