31 janv 2022

Dans la série "Le collectif, c'est nous", ce mois-ci, Vincent Simmonet, paysan de l'Aube.

Entre le social et l'agricole

Vincent est arrivé au Collectif l'année dernière. Il a su très tôt qu'il voulait devenir paysan, mais il a longtemps hésité entre le social et l'agricole et a décidé de danser entre les deux pendant un moment. Il a fait un lycée agricole et un BTS ACSE (Analyse et Conduite d'un Système d'Exploitation), puis une formation pour devenir éducateur spécialisé. Après avoir été éducateur de rue pendant trois ans, c'est son beau-père qui lui a mis le pied à l'étrier en lui proposant en 2010 de reprendre sa ferme en vaches laitières. Elle n'était plus aux normes, il fallait tout refaire. Vincent a décidé de tout transformer : les céréales sont passées en bio, il a monté un atelier maraîchage et un autre d'élevage ovin pour la viande (qu'il a abandonné en 2016 à la naissance de son deuxième enfant : plus assez de temps, et pas assez la foi dans l'élevage !). Il a aussi fait l'acquisition d'un moulin à farine pour transformer une partie de son blé. Aujourd'hui, c'est 4 tonnes de blé sur les 120 qu'il produit qui sont distribuées dans ses paniers, le reste part dans une coopérative locale. En 2019, il a racheté les terrains d'un voisin qui cultivait des fraises sous serres. Il a conservé un demi hectare de fraises et converti l'autre moitié en serres à légumes.

Vincent rêve d'être en 100 % AMAP et vente à la ferme

Cette acquisition est tombée à pic pour accompagner les deux nouveaux partenariats AMAP noués cette année-là. Aujourd'hui, Vincent fournit trois groupes AMAP : deux qu'il a montés à Chatenay et à Sceaux, un à Suresnes qu'il a repris. Il s'est organisé, a investi dans un gros camion et pris un salarié en plus pour l'aider avec les livraisons. Il fait les trois d'un coup le samedi matin. Il regrette de ne pas pouvoir rester à la distribution. Les membres des groupes ne s'en plaignent pas, il faut dire qu'il maintient la communication : il a les responsables des groupes au téléphone chaque semaine, pour donner des nouvelles de la ferme et des productions. Mais il a bien vu à la dernière sortie (la première en deux ans de confinements) que celles et ceux qui sont venus planter des pommiers font partie du noyau dur, aucun nouveau membre n'a fait le déplacement. Il reconnaît là une des limites de son organisation, quand les relations se distendent, ça devient triste. Le modèle AMAP n'est pas le plus simple mais il correspond mieux à sa façon de penser. On a besoin de mordant dans la vie ! Il s'engage sur le poids et la diversité : entre 6 et 8 kilos et jamais moins de 6 légumes différents par panier. Il produit toujours plus que ce qu'il faut pour les paniers et se débrouille pour écouler ses surplus. Il est en partenariat avec un resto du cœur et fournit également un magasin bio à Troyes, et même une branche de Sodexo, contrainte par la mairie de Troyes à s'approvisionner bio et local. Il rêve d'être en 100 % AMAP et vente à la ferme. Son magasin s'est fait connaître pendant le confinement. Depuis, la clientèle est plutôt fidèle. Ce qui lui plaît, c'est d'agir sur son territoire et de créer de l'emploi. Sa ferme compte 82 hectares et emploie 3 ETP (équivalents temps plein).

L'agroforesterie pour restaurer la biodiversité

Récemment, il s'est lancé dans un grand projet d'agroforesterie. Une centaine de pommiers ont ainsi été plantés dans les prairies qui servaient de pâturage aux moutons. Jus de pommes et pommes à croquer pour les paniers, avec un contrat spécifique. L'idée est de continuer à replanter des pommiers dans les champs de blé. Le calcul est simple : ce qu'on perd en blé en étant obligé de tourner autour de l'arbre, on le regagne en jus ou en pommes. Et on restaure la biodiversité. Regarder un oiseau se poser sur un pommier en moissonnant, c'est "intouchable" pour Vincent. Il reste attaché aux céréales parce qu'il aime la mécanique et qu'il aime voir loin à l'horizon. Le maraîchage, on a plus souvent le nez rivé au sol, au ras de ses carottes.

Ses camarades de BTS l'appelait « José » en souvenir du moustachu qui démontait les Macdos. C'était un surnom choisi sans méchanceté mais qui en disait long sur la difficulté à accepter la différence dans une région, l'Aube, majoritairement peuplée de céréaliers conventionnels. Vincent a toujours été partisan de l'agriculture bio et paysanne et de la vente directe. La seule AMAP de Troyes plafonne à 20 paniers en partenariat avec le pionnier du bio dans la région (avec qui Vincent a de passionnants échanges, idéologiques mais pas techniques). Il a vu quelques conversions en 2018, puis tout s'est arrêté avec la fin des aides au maintien décrétée l'an dernier.

Dans le futur proche, il a envie d'installer une salle champignons, pour continuer de diversifier ses paniers. Il s'agit de compost ensemencé, c'est bio mais hors-sol. Il a prévenu ses groupes, ils sont d'accord. Pour livrer toute l'année sans interruption, il faut trouver de quoi garnir les paniers quand vient le printemps, au moment où les réserves s'épuisent et les premières feuilles se font attendre.

Et au réseau ?

Au réseau, il veut s'investir dans l'accompagnement des fermes en activité sur le plan technique et dans le grand chantier de la transmission, en réfléchissant collectivement au modèle des fermes en AMAP. Il y a du pain sur la planche, mais il a un peu plus de temps, et le plein d'énergie.

Allez, c'est parti !

Par Maud, administratrice du réseau

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