28 fév 2022

Dans la série "Le collectif, c'est nous", ce mois-ci, Marina ou l’énergie citoyenne

Marina a rejoint son groupe « La courgette solidaire » aux Lilas (93) il y a 8 ans maintenant. Les distributions ont lieu juste à côté du métro, elle passait devant en rentrant chez elle, elle s'est arrêtée, s'est renseignée, a adhéré. Elle vivait en coloc à l'époque : tout le monde a été motivé pour un panier à partager. Au bout de trois ans au sein du groupe, le temps de faire connaissance et de prendre ses marques, elle a rejoint le collectif d'animation et a pris en charge la newsletter à l'abandon : « La courgette bavarde ». C'était une petite feuille de chou au format papier, qu'elle a modernisée, qui est passée en numérique et qui peut se targuer aujourd'hui d'un taux de lecture record pour une publication de ce type.

Tout s'enchaînait fluidement : les légumes, les épluchures, le compost, le jardin partagé

Dans le prolongement naturel de son engagement à l'AMAP, elle s'est investie dans le collectif citoyen qui montait un compost juste à côté du lieu de distribution. Le local de l'AMAP, comme le parc municipal, sont gracieusement prêtés par la ville des Lilas aux collectifs qui les utilisent. Elle ne savait pas que ce compost allait la mener droit à Bruxelles pour recevoir le prix européen de la réduction des déchets, après que le collectif a publié une étude sur les conséquences concrètes de l'installation du compost à l'échelle de la ville. Tout s'enchaînait fluidement : les légumes, les épluchures, le compost, le jardin partagé. Elle continue de tenir la permanence compost un dimanche de temps en temps et de participer aux apéros-compost. L'expérience a fait des petits : on trouve 7 ou 8 sites de compost aux Lilas aujourd'hui.
Elle a également retrouvé les membres actifs de son AMAP au sein d'une coopérative promouvant la production locale d'énergie : « Électrons solaires », qui utilise l'épargne citoyenne pour construire des panneaux solaires sur les toits des bâtiments publics et revendre l'énergie à Enercoop. Il y a tout un réseau de coopératives de production d'énergies citoyennes reliées au sein de l'association « Énergie Partagée ». Elle a pris en charge la com (c'est son poste favori !) jusqu'à ce que la coopérative déniche un financement de la Fondation de France et d'embauche une salariée pour s'en occuper.

Son groupe adhère au réseau depuis toujours, et envoie chaque année un ou une représentante à l'AG. Au bout d'un moment, Marina s'y est collée. Elle a participé comme ça à deux ou trois AG, quelques formations, puis a sauté le pas et présenté sa candidature pour devenir administratrice. Elle a adoré l'ambiance et le sentiment d'appartenance à un groupe plus vaste que le sien. Elle s'est tout de suite proposée pour accompagner Lucie sur ses missions auprès des fermes. Elle n'y connaît rien mais sent que c'est le cœur du réacteur, le fondement même du système. Grâce à Lucie, elle apprend. Elle a moins d'expérience mais plus de temps que les paysannes et paysans. Et son point de vue de néophyte permet parfois d'ouvrir des discussions salutaires avec celles et ceux qui ont le nez dans le guidon. Elle rêvait aussi de se balader dans les fermes, découvrir la région, mais la situation sanitaire n'a pas permis autant de déplacements qu'espéré.

Ses grand-parents étaient maraîchers en Espagne, et son père les a longtemps aidés jusqu'à ce qu'il poursuive ses études supérieures. Sa tante avait repris l'activité mais personne n'a continué après, faute de pouvoir en vivre correctement. Quand elle a proposé à son père de venir assister à l'AG de son groupe, il a été profondément touché de constater la puissance de la solidarité entre le groupe et le paysan. Il en a conclu que si ce système avait existé, ses parents et sa sœur auraient pu tranquillement continuer d'exercer leur métier. Avec son paysan, Jean-Louis, elle a cette impression de familiarité : il vit à la ferme avec sa mère, son frère et ses nièces, qu'elle a vu grandir. Et puis la ferme est vraiment juste à côté, en trois quarts d'heure on y est.

Les AMAP existent parce qu'il y a des fermes, il faut qu'elles se maintiennent et qu'elles se multiplient.

Au réseau, elle souhaite continuer à accompagner Lucie, parce que le soutien aux paysans et paysannes représente le cœur de son engagement, qui résonne avec le passé et ses racines familiales, et qui s'inscrit dans le futur et le changement climatique. Il va bien falloir nourrir les villes et le transport va devenir compliqué. Relocaliser l'agriculture est donc une priorité. On a souvent l'impression que le sujet de l'alimentation est tellement vaste, tellement important qu'il ne peut être traité que par de grosses structures expertes, mais le réseau lui a appris exactement le contraire. Plus le sujet est important, et vaste, plus il faut l'aborder avec des structures à taille humaine, prônant des valeurs humaines. C'est comme la gestion de l'eau ou de l'énergie, avec la nourriture, ce sont des biens communs qui doivent rester sous contrôle citoyen, et surtout pas passer aux mains de grands groupes. Les AMAP existent parce qu'il y a des fermes, il faut qu'elles se maintiennent et qu'elles se multiplient. Un des paysans de son AMAP, Jean-Luc, annonce son départ à la retraite depuis 8 ans. Cette année, ça y est, c'est fini, il n'a pas préparé les semis du printemps, il arrête. Il livre 200 paniers et n'a pas de repreneur ou repreneuse pour l'instant. Y a pas à tortiller : il nous faut des paysannes et des paysans.

 

Par Maud, administratrice du Réseau AMAP IdF

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