18 déc 2020
Carnet de campagne #2 : l'incertitude plane sur les élections
A la fin du mois d’octobre nous chroniquions sur l’incertitude qui entoure les échéances électorales de 2021. Sans grande surprise le flottement persiste. Le rapport de Jean-Louis Debré1 préconise de reporter les élections départementales et régionales à la fin du mois de juin 2021. La tenue des scrutins à cette date, sera aussi conditionnée par une évaluation sanitaire du pays2. Pour que ces propositions s’appliquent, celles-ci devront être adoptées par le parlement en 2021, mais la date de ce passage n’est pas encore indiquée dans les agendas publics du Sénat et de l’Assemblée nationale. Autrement dit, pour l’instant on navigue à vue…
Nous vous proposons d’abord un petit point d’actualité sur les candidates et candidats officiellement dans la course. Puis, un retour réflexif sur les échanges musclés qui ont eu lieu au Conseil Régional en début de semaine sur la situation de l’agriculture biologique en Ile-de-France. Si cet échange annonce peut-être une prochaine bataille des chiffres, il rappelle aussi que seule une ambition politique claire en matière d’alimentation et d’agriculture permettra de résoudre les difficultés auxquelles nous faisons face dans le monde agricole.
Des listes… et des appels du pied
A droite d’abord, la présidente sortante Valérie Pécresse reçoit le soutien du parti Les Républicains (LR) mais aussi des élus de l’UDI et de certains élus de La République en Marche. De son côté, Jean-Michel Blanquer (actuel ministre de l’éducation) serait le chef de file du parti présidentiel pour les élections régionales (LREM). Plusieurs élus appellent au rassemblement entre les deux « chefs de file ». Leur rapprochement ou non, résultera sans doute de la stratégie choisie de leur parti respectif pour les élections présidentielles de 2022.
A gauche, 3 listes principales rentrent en concurrence. Julien Bayou (élu régional et secrétaire national d’EELV) a annoncé sa candidature dès la rentrée. Et, malgré l’alliance entre le PS et EELV pour gagner les élections municipales de Paris en 2020, Audrey Pulvar (élue adjointe à la mairie de Paris, PS) part en campagne également. Clémentine Autain (députée de la France Insoumise) s’est déclarée elle aussi candidate et a officiellement proposé aux Communistes de se joindre à l’initiative.
Rappelons que lors des élections régionales3, les conseillers sont élus selon un système mixte combinant les règles des scrutins majoritaire et proportionnel. Ce qui signifie que si une majorité absolue ne se dégage pas au premier tour, le second tour autorise des alliances. La liste qui arrive en tête du second tour, obtient alors un quart des sièges à pourvoir.
Les élections départementales fonctionnent selon un principe relativement similaire. Pour chaque canton4, un binôme (femme-homme) est élu au scrutin majoritaire à 2 tours. Le binôme doit obtenir la majorité absolue pour être élu dès le premier tour. Au second tour, c’est le binôme qui obtient le plus grand nombre de suffrages qui est élu5.
Et vous, n’êtes-vous pas intéressés ? Quel que soit l’échelon territorial, les élus Amapiens, Amapiennes, Paysans, Paysannes, sont les meilleurs ambassadeurs de notre modèle.
Les progrès en matière d’agriculture biologique en Ile-de-France : Un débat nécessaire
Lundi 14 Décembre siégeaient en assemblée plénière les élus du Conseil régional (es débats sont disponibles ici). Une séquence particulière a retenu notre attention : l’élue Ghislaine Sénée (Groupe Alternative Ecologique et Sociale) et la Vice-Présidente Alexandra Dublanche ont eu quelques passes d’armes sur l’évolution de l’Agriculture Biologique en Ile-de-France.
La séquence est un peu longue car l’échange démarre 9’48’54 et se termine à 10’30’52 et il est entrecoupé par les amendements et interventions d’autres élus. Dans l’échange qui nous intéresse Alexandra Dublanche souligne les efforts réalisés par la région. Selon elle, ils auraient permis de doubler la surface agricole utile (SAU) en agriculture biologique (AB) au cours du mandat, passant ainsi de 2% à 5%. Elle note également que l’Ile-de-France a été la région la plus performante en matière de progression en Surface en bio en 2020. En face, Ghislaine Sénée affirme que cette progression n’a rien de spectaculaire et que l’Ile-de-France demeure un mauvais élève en matière de transition agro écologique.
Quels sont les progrès de l’Ile-de-France en matière d’agriculture biologique, notamment ces dernières années ?
Si l’on devait comparer les régions entre elles, l’Ile-de-France est plutôt mal classée en matière de surfaces conduites en agriculture biologique, car elle est la 11e Région (sur 14). Loin, derrière la région PACA (29% de SAU en bio), l’Occitanie (16% de SAU en bio)6 ou même simplement, au regard de la moyenne nationale qui est de 8,5% de SAU en bio. Mais, si l’on regarde seulement au niveau intra-régional (comme sur ce graphique tiré de la page 6 de l’édition 2020 de l’observatoire du GAB7), il est exact de dire que les surfaces en bio ont nettement progressé. Il est également juste de dire que la surface en bio a plus que doublé au cours du mandat de Valérie Pécresse ou encore que la croissance de 2020 est particulièrement positive.
Source : GAB IDF, Observatoire Régional de l’Agriculture Biologique en Ile-de-France. Chiffres à fin 2019. Edition 2020 (1)
On remarque dans le graphique réalisé par le GAB, qu’il y a une augmentation significative des conversions en 2018 et en 2019. L’accompagnement à la conversion des exploitations et de modes de productions, constitue donc un levier d’action essentiel et permet à de nombreux agriculteurs de changer de modèle s’ils le souhaitent. Si cette croissance est positive, ce choix d’accompagnement à la conversion ne suffira pas pour modifier durablement les pratiques agricoles en Ile-de-France (diversification, ferme à taille humaine, agro-écologie etc.).
Le problème majeur du changement de pratique est aussi lié aux difficultés que rencontrent d’une part, les porteurs de projets dans leurs projets d’installation agricole, et d’autre part les agriculteurs ayant l’âge de partir à la retraite et souhaitant céder leur ferme. Le renouvellement démographique des agriculteurs relève d’un pas de temps long qui doit être anticipé et accompagné par les politiques publiques. Autrement, le nombre de fermes franciliennes vont continuer à réduire et seules quelques grandes exploitations qui en auront les moyens vont croître. A ce titre, la région ne peut pas se contenter de travailler sur la conversion des grandes fermes (souvent céréalières). Si elle veut continuer de progresser en matière de changement de pratique agricole, elle doit se fixer des objectifs clairs et une méthode d’installation et de transmission. En effet, c’est au moment de la transmission que s’opèrent les changements les plus importants sur une ferme (passage en bio, changement d’activité, diversification, reprise en collectif etc). Or, actuellement les quelques dispositifs d’accompagnements à la transmission ne permettront pas à eux-seuls de faire face au nombre massif d’agriculteurs qui partiront à la retraire d’ici 10 ans.
C’est pourquoi, le Réseau des AMAP Ile-de-France et Terre de Liens Ile-de-France, en lien avec l’association Abiosol, travaillent actuellement sur des mesures concrètes en matière d’installation et de transmission, qui seront soumises aux différents candidats, pour qu’ils intègrent dans leur programme cet enjeu majeur pour l’avenir de l’agriculture francilienne.
Par Ariane, salariée du Réseau AMAP IdF
1/ Rapport dont l’objet est d’étudier les conditions dans lesquelles les élections pourraient se tenir : https://www.gouvernement.fr/sites/default/files/document/document/2020/11/rapport_de_m._jean-louis_debre_-_13.11.2020.pdf (site consulté le 17/12/2020)
2/ L’évaluation sera effectuée par le conseil scientifique et sera remise directement au Parlement
3/ https://www.vie-publique.fr/fiches/20177-quel-est-le-mode-de-scrutin-pour-les-elections-regionales (site consulté le 17/12/2020)
4/ http://www.chroniques-cartographiques.fr/2015/02/carte-interactive-des-nouveaux-cantons-de-france.html (site consulté le 17/12/2020)
5/ https://www.service-public.fr/particuliers/vosdroits/F1958 (site consulté le 17/12/2020)
6/ https://www.agencebio.org/vos-outils/les-chiffres-cles/ (site consulté le 17/12/2020)
7/ https://www.bioiledefrance.fr/documents/2020-observatoire-web.pdf (site consulté le 17/12/2020)