L'AMAP bio de Sceaux (92) a lancé une initiative remarquable, étendant l'accès à une nourriture saine et durable à celles et ceux qui en ont le plus besoin. En collaboration avec le Secours Catholique, un « tarif social » a ainsi été mis en place afin de permettre aux familles les plus démunies d'intégrer l'AMAP malgré la faiblesse de leurs moyens financiers. Huit familles en situation de précarité bénéficient à l'heure actuelle de paniers de légumes frais et bio, à moindre coût.

Dans le cadre de mon stage au réseau, j'ai rendu visite à l'AMAP bio de Sceaux pour discuter avec les personnes ayant rejoint l'AMAP grâce au partenariat avec le Secours Catholique et ainsi échanger sur leur accueil, les légumes du panier et la manière de les cuisiner ou encore leur envie de poursuivre au sein de l'AMAP. Ces échanges ont été d'une richesse remarquable et sont autant utiles pour le Réseau que pour les AMAP, d'autant que l'intégration des nouvelles familles n'est pas sans défi.

Un dispositif double pour faciliter l'intégration à l'AMAP

Dans un premier temps, l'AMAP donne son surplus de légumes à des familles démunies identifiées par le Secours Catholique. Chaque semaine, à la toute fin de la distribution, l'une de ces familles vient à l'AMAP récupérer les légumes restants, qu'elle dispatche ensuite aux autres. Ce dispositif permet de changer significativement le quotidien de familles désargentées par un apport de légumes frais, bio, de qualité, mais il possède des limites :

• les familles démunies ne savent jamais quelle quantité de légumes elles vont récupérer ;
• elles sont peu intégrées à l'AMAP ;
• elles arrivent en fin de distribution et ont conscience de bénéficier d'une action charitable ;
• deux des lieux de distributions AMAP se situent au centre-ville, pas tout près du lieu d'habitation des familles en difficulté.

Dans un second temps, un dispositif de « tarif social » est discuté, auquel le Secours Catholique est associé. Dès sa création, l'AMAP bio de Sceaux souhaite s'adresser à tous. Ce projet de tarif social suscite un grand enthousiasme : l'écrasante majorité des amapien·nes y adhère.

Après une gestation de plusieurs mois, nécessaire notamment à la rédaction d'une convention tripartite Amap bio de Sceaux - Secours catholique- Ferme Simonnet, le nouveau dispositif est mis en place. Ses principes sont les suivants :

• Les familles bénéficiaires du tarif social paient, selon leurs moyens, 3 ou 6 euros un demi-panier de légumes qui vaut 12 euros. Et 6 ou 12 euros un panier qui en vaut 24.
• Le complément est pris en charge par le Secours Catholique qui subventionne le dispositif à hauteur de 10.000 euros.
• Le Secours Catholique paye directement le paysan Vincent Simonnet, et se charge de collecter l'argent des familles bénéficiaires du tarif social.
• Ce partenariat AMAP bio de Sceaux- Secours Catholique – Ferme Simonnet permet aux familles qui en bénéficient d'accéder à une alimentation de qualité, mais aussi d'améliorer leur inclusion sociale. Elles bénéficient ainsi du réseau de connaissances et d'entraide de l'AMAP (par exemples, mise en place de différents groupes de dons de vêtements, d'échange de services, de bons plans, de méditation gratuite etc.).

Lever les freins

Différents freins auraient pu nuire à l'intégration dans l'AMAP des familles bénéficiaires du tarif social. L'AMAP et le Secours Catholique ont fait en sorte de les lever.

• Certaines familles ne maîtrisant pas le français auraient pu être intimidées par le contrat AMAP.
  ► L'AMAP a simplifié le contrat et créé une charte d'engagement en trois parties : pour les paysans, le Secours Catholique et l'AMAP. 
• Le tarif solidaire peut être trop élevé pour certaines familles en situation de précarité.
  ► Le Secours Catholique est assez souple dans les modalités de paiement des familles, chacune participe à la hauteur de ses moyens.
  « Avant, on ne donnait rien, c'était totalement gratuit, et là, on donne quelque chose, je trouve ça important » me confie une bénéficiaire du partenariat.
• Comme tout nouveau membre de l'AMAP, ces familles ont dû en comprendre le fonctionnement.
  ► L'AMAP a fait un effort particulier pour les accueillir lors de leur première distribution.
  « On demande un peu comment il faut faire, mais l'accueil était bien et je l'apprécie encore » me rapporte une bénéficiaire du partenariat.
• Comme beaucoup, certaines familles ne sont pas habituées à cuisiner certains légumes.
  ► L'AMAP a créé un groupe WhatsApp de partage de recettes.
  « Maintenant on a créé un groupe Whatsapp, pour les recettes et les légumes qu'on ne maîtrise pas.  Ceux qui connaissent des choses écrivent, c'est ça qui est intéressant pour moi » reconnaît une bénéficiaire du partenariat.

• Deux des lieux de distribution AMAP sont en centre ville, à distance du lieu d'habitation des familles démunies.
  ►Un troisième point de distribution a été mis en place au sein du Centre Social et Culturel des Blagis (CSCB), plus proche du quartier où vivent nombre des familles bénéficiaires du contrat AMAP à tarif social. Ce troisième point de distribution est vite devenu un lieu de mixité sociale, très convivial.

Dans mes entretiens, les familles expriment en général être satisfaites des produits et de la quantité fournie par l'AMAP. Elles apprécient particulièrement la qualité des légumes, l'aspect communautaire et solidaire de l'AMAP, l'accessibilité financière et l'opportunité d'apprendre à cuisiner de nouveaux légumes.

L'AMAP travaille activement à pérenniser ce partenariat avec le Secours Catholique, afin de pouvoir continuer à soutenir ces familles et peut-être d'autres groupes en situation de précarité, tels que les personnes âgées isolées.

Par Aymeric Hullin, stagiaire au Réseau AMAP IdF