30 nov 2020

"Se nourrir quand on est pauvre" ?

A travers ce premier rendez-vous, il s’agissait de mieux comprendre ce que vivent les personnes "en précarité alimentaire". Comment se nourrissent-elles ? Qu’est-ce qu’elles en disent ?, afin de sortir des idées reçues et des solutions "toutes faites".

Les intervenantes :

  • Huguette BOISSONNAT-PELSY, Docteur du département santé d’ATD Quart Monde. Présentation des rapports "Se nourrir quand on est pauvre" et "57 euros par mois".
  • Sophie HEGE, chargée de projets alimentaires dignes et durables au Pays Terres de Lorraine. Présentation de l'expérimentation "La Dignité Dans Les Assiettes

Plongée en Lorraine, où des travaux autour de l’accès à une alimentation digne et durable ont été menés par ATD Quart Monde et le Pays Terres de Lorraine.

Huguette Boissonnat, rappelle l’importance de l’alimentation dans la construction de l’identité individuelle, collective et sociale des personnes, ainsi que l’impact fort des normes sociales, culturelles, religieuses autour de l’alimentation. Les personnes en précarité alimentaire sont, par exemple frappées de plein fouet par les « injonctions paradoxales » des politiques de prévention : « Mangez bio ! », « Mangez 5 fruits et légumes par jour », quand pour certain.es le principal souci est tout simplement de manger.

Elle rappelle également les ravages que peuvent représenter une difficulté d’accès à l’alimentation ou une alimentation subie, dans une société de consommation où être citoyen.ne, c’est être consommateur.trice : « C’est le fait de choisir et de payer qui est important », autant pour l’estime de soi que pour le rapport aux autres. Pour certains, « mieux vaut la faim que la honte ». Or la honte est souvent présente lors des distributions d’aide alimentaire, du fait du demandeur d’aide d’être passif et infantilisé, de la maladresse ou du positionnement du bénévole aidant.

« L’alimentation est le vecteur de libération des personnes pauvres ». Quand on casse le cercle vicieux de l’alimentation, on peut se préoccuper du reste (l’emploi, la culture…). C’est ainsi qu’a été lancé le projet « Se nourrir dignement et durablement avec 57 euros par mois ». Dignement, car il s’agit de choisir et de reprendre du pouvoir sur son alimentation, et durablement car chacun.e est conscient.e de la nécessité d’accéder à des produits alimentaires qualitatifs. L’équipe d’ATD s’est alors lancée le défi de composer un panier de courses mensuel ne dépassant pas 57 euros pour le mois (reste à vivre de certains ménages, une fois les charges incompressibles payées), avec des produits qualitatifs. Recherche des bons plans bio, des promotions, des achats groupés auprès de producteurs, auto-production… toutes ces techniques, ces « expertises de la survie », ont permis à chacun.e de composer son panier digne et durable, mais également de reprendre du pouvoir sur son alimentation. En plus d’être actrices de leur alimentation, les personnes sont devenues tour à tour « expertes », « conseillères ».

Sur ces entrefaites, le territoire Terres de Lorraine s’est emparé de la question. Son Projet Alimentaire Territorial permettait de croiser les enjeux de reterritorialisation de l’alimentation et de lutte contre la pauvreté. Le Pays a alors rassemblé un collectif d’acteurs, qui a, ensemble, défini les chantiers prioritaires du territoire, à savoir :

  • l’accès à des produits locaux pour les personnes en situation de précarité alimentaire via la création d’achats groupés dénommés « emplettes et cagettes »
  • l’amélioration de l’aide alimentaire via la mise en place d’une co-formation des bénévoles, des salarié.es, et des personnes précaires sur le contenu de l’aide alimentaire et sur l’accueil des personnes.
  • l’accès au foncier via la mise à disposition de parcelles cultivables et la mise en place de jardins nourriciers.

Un temps fort du projet, lors de la journée de regroupement « De la dignité dans les assiettes » en mars 2019, a permis de rappeler encore et toujours que l’enjeu majeur des projets de territoires en termes de lutte contre la pauvreté, est de mettre au centre du projet les personnes concernées, qui sont expertes de la précarité, qui ont des solutions à proposer et qui peuvent, par ce biais, regagner confiance et dignité.


Ce premier atelier était organisé dans le cadre du cycle de formations sur l’accessibilité, le deuxième aura lieu mercredi 2 décembre de 18h30 à 20h. Dominique Paturel, chercheuse à l’INRAE interviendra sur les grandes notions autour de l’accessibilité. Infos et inscriptions ici

Par Noémie, salariée du Réseau

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