27 mai 2019

Moussa : « Léonard de Vinci dans les champs »

 Celui qui organise, construit, réfléchit, teste, découvre.

Moussa a fait des études d’ingénieur. Il intègre l’école Télécom Saint Etienne en 2010. A son arrivée, on lui annonce que 80 % des diplômés se réorientent au bout de 2 ans. Il n’a pas tenu un mois de plus ni de moins. Il lui a suffi de deux ans pour comprendre qu’il n’était pas au bon endroit.
"Au bout de deux ans, je savais écrire des mails et passer des coups de fil, mais rien faire de mes mains. J’admirais les techniciens de ma boîte, capables de construire un portail avec trois bouts de métal. Moi, je ne savais rien faire de mes mains. Je travaillais pour des actionnaires que je ne connaissais pas, sans comprendre le sens des tâches que j’exécutais, alors que j’étais censé être celui qui sait. Je me faisais sans doute une idée un peu romantique du métier d’ingénieur, comme l’héritier de Léonard de Vinci : celui qui organise, construit, réfléchit, teste, découvre.
En fait, je ne me suis jamais senti aussi ingénieur que depuis que je suis maraîcher !
Je dois conjuguer planification, organisation, recherche et développement (d’où vient cette maladie, ce parasite ?), mécanique (quand il faut réparer les outils). Le travail de paysans est très technique, exige beaucoup de rigueur (penser à voiler ses patates, au risque de brûler les feuilles au premier gel : expérience vécue !)."

De Médecins du Monde au BPREA

C’est en allant voir une projection de « Solutions locales pour désordre global » de Coline Serreau (vous savez ce film génial dans lequel on aperçoit Laurent Marbot, comme on le racontait dans son portrait, dans la lettre de mars 2018) au siège de Médecins du Monde, asso dans laquelle il fait du bénévolat, que Moussa découvre le système des AMAP. Il était au chômage, après deux ans dans le domaine du déploiement de réseaux télécoms, et il couvait depuis un moment l’idée de se reconvertir. En rencontrant Boris Canal, le paysan du groupe AMAP de Médecins du Monde, en réalisant que les maraîchers, ça existe près de chez vous, il décide d’adhérer au groupe comme intermittent pour pouvoir aller filer un coup de main à la ferme. Dans la foulée, il franchit le pas et s’inscrit en BPREA.
Ses stages, il les a faits sur le site de Saint Augustin dans le 77, là où Boris s’était fraîchement installé après un passage en couveuse à Toussacq. À la sortie du BPREA, le voisin de Boris, Marc (lui aussi passé par la couveuse de Toussacq), propose un salariat à Moussa, puis, voyant que ça se passait bien, lui propose de devenir son couvé. Marc est installé sur 2 hectares et fournit 60 paniers. Avec Moussa, il passe à 90, et Moussa se trouve un groupe à Montreuil, à qui il livre 30 paniers.

Prendre part au mouvement pour faire entendre sa voix

Aujourd’hui il a repris une parcelle à Toussacq, et il est toujours en partenariat avec le groupe de Montreuil, Le cri du radis.
Son expérience de couvé, chez Marc comme à Toussacq, lui a donné envie de s’impliquer dans la structure des Champs des Possibles. La coopérative est d’ailleurs en pleine réflexion sur son fonctionnement, et c’est le bon moment pour s’organiser. Moussa participe ainsi à l’initiative des couvé.e.s de se réunir pour faire le bilan de l’accompagnement proposé et des façons dont on pourrait le faire évoluer. Le Conseil de Coopérative des Champs des Possibles, comme le Collectif du Réseau des AMAP, Moussa se disait que c’étaient des cercles fermés très VIP, et un peu obscurs, pleins de gens importants qui décident des choses dans le secret de chambres closes, et qu’il n’avait rien à y faire. En fait, il découvre avec délice que, non seulement il a le droit d’y être, mais qu’il y est le bienvenu. Il comprend que c’est en participant à ces instances qu’on peut faire entendre sa voix et infléchir les stratégies. C’est fort de ces découvertes qu’il a décidé de se taper la double dose d’engagement en intégrant le Conseil de Coopérative des Champs des Possibles au sein du collège des couvé.e.s, et le Réseau des AMAP au sein du collège paysan.ne.s. Pour comprendre, apprendre, et être acteur du changement.

C’est peu de dire qu’ici on se réjouit. C’est parti mon kiki !

Par Maud, administratrice du Réseau

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